Publié le 31 août 2021
ÉCONOMIE
La fin de l’obligation du télétravail ne signe pas un retour au "monde d’avant"
Fini le télétravail obligatoire. Le gouvernement vient de retirer l'obligation d'un "nombre de jours minimal" de travail à distance dans les entreprises. Ces dernières pourront désormais choisir, via le dialogue social, si elles conservent, ou non, ce mode de travail et dans quelle proportion. Un retour en arrière semble toutefois inenvisageable tant la crise sanitaire a bouleversé les habitudes.

Jason Strull on Unsplash
C’est la fin du "nombre de jour minimal" de télétravail imposé aux entreprises. À partir de ce mardi 31 août, les employeurs ne sont en effet plus soumis à cette règle que le gouvernement avait mis en place au début de la pandémie de Covid-19 pour casser les chaînes de contamination. "Mes équipes ont échangé la semaine dernière avec les organisations patronales et syndicales, qui souhaitent toutes qu'on redonne la main aux entreprises pour fixer les règles en matière de télétravail, qu'on n’ait plus un nombre de jours minimal : c'est ce qu'on va faire", a expliqué la ministre du Travail, Élisabeth Borne sur BFM TV le 30 août. Un nouveau protocole sera bientôt publié pour permettre "à la direction de l'entreprise, en discussion avec les représentants des salariés, de définir les règles en matière de télétravail".
Déjà le 9 juin, le gouvernement avait assoupli les règles de télétravail en entreprise. Jusqu’alors la règle était de pratiquer de manière systématique le télétravail pour toutes les activités qui le permettaient. À partir de cette date, les entreprises ont dû déterminer, à l’issue d’échanges entre la direction et les représentants des salariés, "un nombre minimum de jour de télétravail pour chaque employé", expliquait le gouvernement. Et cette plus grande flexibilité se ressent dans les chiffres.
Le début du "vrai télétravail"
Selon la Dares (Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques), le télétravail devient "de moins en moins fréquent". "Au cours du mois de juillet, 23 % des salariés ont été au moins un jour en télétravail, soit deux points de moins qu’en juin et mai, et quatre points de moins qu’en avril", écrit-elle. En outre, "les salariés concernés par le télétravail ne sont plus que 14 % à avoir télétravaillé tous les jours de la semaine", "soit 3 % de l’ensemble des salariés, après 4 % en juin, 8 % en mai et 10 % en avril".
Est-ce donc la fin du travail à distance ? "Non, je pense au contraire que c’est le début du "vrai" télétravail", croit Benoit Serre, vice président de l’Association nationale des DRH interrogé par 20 minutes. "On a beaucoup dit pendant la pandémie - à juste titre - que le télétravail forcé, obligatoire, était très bien pour certains mais subi par d’autres. L’annonce de la ministre indique que les entreprises reprennent la main sur leur organisation. En parallèle, beaucoup d’accords d’entreprises ont été signés sur le télétravail, qui va donc s’installer durablement, de manière structurée et organisée", explique-t-il. "Dans deux, trois mois, on se rendra compte que ce système est devenu une alternative normale au travail. On le voit déjà avec certains petits signaux, comme des offres d’emploi avec du télétravail de principe, par exemple."
Une formule hybride
Le Covid-19 a en effet laissé des traces. Si ce mode de travail, poussé à l’extrême, a parfois viré à l’écœurement, la crise sanitaire a marqué un vrai tournant dans l’organisation du travail. Selon un sondage de l’Institut Montaigne, 60 % des Français souhaitent "une fois l’épidémie de Covid-19 terminée, que les entreprises mettent en place la possibilité pour les salariés de faire du télétravail sur une partie du temps de travail et être en présentiel sur l’autre partie".
L’enjeu, pour les entreprises, est désormais de trouver la bonne formule. De nombreuses sociétés se tournent désormais vers un modèle hybride qui permettra de lutter contre l’isolement que certains salariés ont pu ressentir tout en conservant les bénéfices du travail à distance comme le gain de temps lié au transport par exemple. Les cartes sont désormais entre les mains des syndicats et des entreprises qui devront négocier sur la base de l’accord interprofessionnel signé fin novembre 2020.
Marina Fabre, @fabre_marina avec AFP