Publié le 24 février 2023
ÉCONOMIE
Inflation record, exclusion financière de la Russie, marché de l’énergie… La guerre en Ukraine, un an après (2/3)
Le 24 février 2022, la Russie lançait l’invasion de l’Ukraine. En un an, la guerre a dévasté le pays et provoqué des milliers de morts. Les conséquences du conflit se font ressentir dans l’économie mondiale. Le marché de l’énergie a été profondément transformé, les pays européens ayant dû trouver des alternatives au gaz et pétrole russe. La crise énergétique a accentué l’inflation, que les banques centrales ont dû combattre. L’exclusion des banques russes du système bancaire international a poussé la Russie à trouver des alternatives. Voici le deuxième épisode de notre série consacrée à l’invasion russe, un an après.

@Bobok Sergei
Le marché de l’énergie, transformé durablement
Il y a le verre à moitié plein et le verre à moitié vide. L’arrêt des importations de gaz russe a poussé les pays européens à chercher rapidement des alternatives. Ils se sont tournés vers d’autres pays producteurs de gaz, notamment les États-Unis, devenus le premier fournisseur de l’Union européenne en 2022. Mais ces nouvelles importations sont constituées en grande partie de gaz naturel liquéfié issu du gaz de schiste américain. Une mauvaise nouvelle pour le climat, selon une étude de Carbone4, le GNL émet deux fois plus de gaz à effet de serre que le gaz transporté par gazoduc. Or, pour sécuriser leurs approvisionnements en gaz, les Européens prévoient la construction de 32 projets de terminaux d’importation du GNL, expliquent les Amis de la terre. "Une réaction dangereuse" pour l’ONG, qui craint que l’Europe ne soit dépendante du GNL pendant trop longtemps.
Côté verre à moitié plein, la réaction d’urgence s’est aussi accompagnée d’une montée des énergies renouvelables. "L'hiver plus doux a protégé l'économie et le climat des impacts les plus graves de la guerre jusqu'à présent, souligne dans une note Matt Christensen, responsable de l’investissement responsable de la société de gestion AllianzGI. Néanmoins, les arguments en faveur d'une architecture énergétique résiliente sont clairs - les énergies renouvelables devraient avoir franchi le cap des 300 GW pour la première fois l'année dernière." En 2022, la production d’électricité à partir du solaire et de l’éolien a ainsi dépassé celle du gaz et du charbon, selon le cabinet Ember. La France, de son côté, vient ainsi d’adopter son projet de loi d’accélération des énergies renouvelables.
L’accélération de l’inflation pousse les banques centrales à réagir
Si la montée de l’inflation a commencé plusieurs mois avant la guerre en Ukraine, celle-ci a accentué le phénomène. La crise énergétique suite à l’invasion russe a renchéri le coût du pétrole et du gaz, permettant aux majors de l’énergie d’enregistrer des résultats financiers records sur l’année 2022. La Russie et l’Ukraine sont par ailleurs de grands pays céréaliers. Le conflit a provoqué d’importants dérèglements de la chaîne de valeur, dont une augmentation du coût des denrées alimentaires. Selon le FMI, l’inflation mondiale a atteint un pic à 8,8% en 2022, mais devrait retomber à 6,6% cette année.
Pour contenir ce phénomène de hausse des prix qui ne s’était pas produit en Europe depuis près de dix ans, les banques centrales ont décidé de procéder à des hausses de leurs taux. En renchérissant le coût de l’argent, elles comptent ralentir le rythme de la croissance économique et faire baisser les prix. "Nous allons ramener l’inflation vers 2% d’ici fin 2024 ou fin 2025. C’est notre mandat, et l’inflation est aujourd’hui la première préoccupation de nos concitoyens", a déclaré François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France, devant la commission Finance du Sénat début janvier.
Les banques russes, exclues du système international de messagerie financière
C’était "l’arme nucléaire financière", selon Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie et des finances. Le 12 mars 2022, sept banques russes ont été exclues du réseau Swift, le système de messagerie bancaire international. Ce réseau, peu connu du grand public, gère les communications et les transferts interbancaires. Il relie 11 000 établissements financiers présents dans 200 pays. Le fait d’en être déconnecté empêche les banques russes de réaliser toute transaction avec leurs homologues étrangères, paralysant de fait le commerce international de la Russie.
Un an après la sanction, l’économie russe a cherché à contourner en partie la sanction financière. Elle a tenté de se connecter aux messageries financières d’autres pays, notamment en Chine (système CIPS). Fin janvier 2023, la Russie s’est rapprochée de l’Iran, autre pays exclu de Swift. Les deux pays ont conclu un accord pour connecter leurs systèmes de messagerie bancaire, le Sepam en Iran et le SPFX en Russie. Selon la banque centrale iranienne, 52 banques iraniennes pourront ainsi être connectées aux 106 établissements utilisant le système russe.
Arnaud Dumas, @ADumas5