Publié le 13 septembre 2022
ÉCONOMIE
Haro sur les influenceurs: fin du placement de produits bling-bling ?
Près d’un million de spectateurs ont regardé l’émission "Complément d’enquête" diffusé le 11 septembre sur les dérives des influenceurs, spécialistes du placement de produits et de fortunes dans les paradis fiscaux. L’impact sur leur terrain de jeux, les réseaux sociaux, est considérable. Mais c’est maintenant à la justice d’enquêter après la plainte pour escroquerie déposée contre la principale agence française d’influenceurs par le rappeur Booba. Influenceur, un métier à risque d’allégations trompeuses ?

@iStock / Grinvalds
Le titre de l’émission "Complément d’enquête" diffusée sur France 2 était prometteur : "Arnaques, fric et politique le vrai business des influenceurs". Elle a tenu ses promesses révélant au grand jour les petites combines et les grosses fortunes de ceux dont le métier consiste, pour l’essentiel, à faire vendre des produits. Ils les portent, les testent et les conseillent à leur audience. Leurs abonnés constituent une sorte de marché captif où ce marketing direct fait un tabac. Plus ils sont nombreux, plus cela rapporte gros. Comme le montre le tweet ci-dessous, ces influenceurs bling-bling sont très fiers de revendiquer l’absence totale de paiement d’impôts sur leurs revenus grâce à l’installation dans des paradis fiscaux comme Dubaï.
"Quand t'as un business qui marche, t'es content de travailler parce que tout ce que tu fais ça revient pour toi et tu donnes rien aux autres".
A Dubaï, le paradis des #influenceurs est aussi fiscal#ComplementDenquete
pic.twitter.com/9jqC3LDkfQ— Tristan Waleckx (@tristanwaleckx) September 11, 2022
Au-delà des attaques contre la capacité de ces influenceurs à véhiculer un mode de vie bling-bling où tout n’est que luxe tapageur, l’enquête de France 2 révèle la capacité de cet ultime avatar de la société de consommation à générer des arnaques.
Les premières victimes sont les followers de ces starlettes rendues célèbres par la téléréalité. Il y a quelques jours, le parquet de Grasse a ouvert une enquête à la suite de la plainte pour escroquerie déposée par le rappeur Booba contre la principale agence d’influenceurs françaises, Shauna Events dirigée par Magali Berdah. La peine pour les faits dénoncés peut aller jusqu’à 10 ans de prison. Si le business de l’influence a été particulièrement lucratif, une émission comme Complément d’enquête, ainsi que la plainte pour escroquerie, contribuent largement à décrédibiliser ces influenceurs qui ont tout fait pour empêcher la diffusion du reportage.
Multiplication des escroqueries
Ces mises en garde sont d’autant plus indispensables que les escroqueries se multiplient. Dans le viseur des autorités de marché pour la promotion de conseils financiers risqués, ce type d’influenceurs sont aussi accusés de faire vendre des vrais-faux produits dangereux et d’exposer leurs utilisateurs à de vrais risques. L’influenceuse Cindy par exemple a utilisé le champoing Nicky Cosmetics pour lequel elle faisait du placement de produits. Elle a perdu ses cheveux par poignées. Elle a raconté à Brut que l’agence qui les fabriquait lui avait recommandé de faire semblant pour continuer à diffuser massivement un produit contenant des substances toxiques dont les services de l’État demandaient l’interdiction !
Pour certains le premier problème est la crédulité de ceux qui suivent aveuglement des influenceurs bling-bling dont l’icône a longtemps été Kim Kardashian. Pour d’autres le problème est beaucoup plus profond puisqu’ils sont aujourd’hui le principal vecteur de diffusion marketing de nombreux produits. La marque cosmétique CéraVé peut en témoigner. Spécialiste des soins pour la peau accessible, elle est devenue un succès mondial uniquement grâce à la recommandation des influenceurs de Tik Tok et sans aucun marketing traditionnel !
Anne-Catherine Husson Traore, @AC_HT_, directrice générale de Novethic