Publié le 20 janvier 2023

ÉCONOMIE

Goldman Sachs lance son plus grand plan de licenciement depuis la crise financière de 2008

[2023, année de la crise] Goldman Sachs dans la tourmente. La banque américaine affichait pourtant des bénéfices records depuis plusieurs années, portée par ses opérations de financements pour les entreprises. Même les controverses qu’elle a enregistrées ne l’avaient pas freinée. Mais la hausse de l’inflation et le risque de récession semblent avoir eu raison de ses résultats financiers.

Goldman Sachs siege banque Michael Santiago Getty Images via AFP
Goldman Sachs a décidé de licencier près de 6,5% de ses effectifs mondiaux au début de l'année 2023.
@Michael Santiago / Getty Images via AFP

La banque américaine Goldman Sachs commence mal l'année 2023. Les banques d’affaires avaient largement profité du redémarrage de l’économie mondiale après les phases de confinement. Les faibles taux d’intérêt et les masses importantes de liquidité sur les marchés leur donnait des ailes, les entreprises en profitant pour investir, racheter des concurrents, recruter… Aujourd’hui, le risque de récession de l’économie mondiale siffle la fin de la récré. Goldman Sachs a vu ses profits fondre de 69% au quatrième trimestre 2022 et a décidé de tailler dans ses effectifs pour réduire ses coûts.

À New York, Londres, Hong Kong et ailleurs, près de 3200 personnes ont été priées de prendre leurs affaires et de quitter leur bureau, parfois en moins d’une demi-heure, avec des pratiques qualifiées de brutales par de nombreux médias anglo-saxons. Près de 6,5% des effectifs de la banque sont concernés, soit le plan de licenciement le plus important depuis la crise financière de 2008. La banque prévoit également de réduire drastiquement les bonus de ses traders et de ses banquiers cette année. En 2009, juste après l’une des plus graves crises financières, le PDG de Goldman Sachs de l’époque avait pourtant justifié les bonus importants par la mission sociale des banques qui accomplissait "le travail de Dieu"…

Embauches massives après la pandémie

Goldman Sachs est particulièrement connue pour ses activités de banque d’investissement, c’est-à-dire celles dédiées au montage d’opérations financières pour les entreprises. En 2021, alors que l’économie mondiale retrouvait des couleurs après la parenthèse des confinements, le marché des fusions et acquisitions avait connu l’un de ses plus hauts niveaux, avec une croissance de 64% selon les données du cabinet d’avocat d’affaires Allen & Overy. La banque américaine surfait alors sur le haut de la vague et embauchait à tour de bras pour répondre à la demande. Les effectifs sont ainsi passés d’un peu plus de 38 000 personnes employées dans le monde en 2019, à près de 44 000 en 2021.

En 2022, tout change. L’euphorie de la reprise est retombée, les entreprises se révèlent plus frileuses et le volume d’opérations chute de 38%. Plusieurs facteurs ont contribué à ce retournement. Les tensions géopolitiques mondiales, notamment du fait de la guerre en Ukraine, ont déstabilisé les chaînes d’approvisionnement, provoqué une crise énergétique et amplifié le phénomène d’inflation. Les banques centrales ont réagi en durcissant les taux d’intérêt pour tenter de contenir la hausse des prix. Le ralentissement de l’économie et le coût plus élevé de l’argent ont eu raison des projets des entreprises… et des banques d’affaires.

D’énormes bénéfices pour les six grandes banques américaines

Malgré le revers enregistré en 2022, Goldman Sachs est cependant loin d’être à plaindre. Selon une étude de Bloomberg, les six grandes banques américaines (JP Morgan Chase, Bank of America, Wells Fargo, Citigroup, Goldman Sachs et Morgan Stanley) ont encaissé pas moins de 1000 milliards de dollars de bénéfices dans les dix dernières années. Elles semblent s’être remises sans trop de peine de la crise financière de 2008, pendant laquelle les groupes bancaires avait failli faire tomber l’ensemble de l’économie mondiale.

Si la réglementation bancaire a été renforcée après la crise, elle a rapidement été de nouveau assouplie aux États-Unis pour laisser libre cours à l’activité des établissements financiers. Selon Bloomberg, la baisse de la fiscalité des entreprises décidée par Donald Trump lors de son arrivée à la Maison Blanche leur a notamment permis de faire bondir leurs bénéfices.

Les controverses ont pourtant été nombreuses. Goldman Sachs cumule ainsi l’affaire du fonds malaysien 1MDB en 2013, dont une partie a été détournée, et qui lui a coûté plusieurs milliards de dollars de pénalités aux autorités. Plus récemment, dans son activité de gestion d’actifs, Goldman Sachs a été contrainte en novembre 2022 de passer un accord avec le gendarme américain des marchés financiers et payer une amende de 4 millions de dollars en raison de ses mauvaises pratiques sur les produits financiers durables. Selon le régulateur, elle proposait à ses clients des fonds ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) sans véritablement réaliser d’analyse en amont.

Arnaud Dumas, @ADumas5


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