Publié le 21 novembre 2020
ÉCONOMIE
[À l’origine] Quand les États voulaient éviter que l’espace ne devienne le Far West
L’émergence du New Space, cette nuée d’entreprises privées qui développent des capacités spatiales, à commencer par SpaceX, laisse présager un nouvel âge de la conquête du système solaire. C’est aussi une rupture avec les modèles antérieurs qui réservaient l’accès à l’espace aux États. Ceux-ci avaient alors pris soin que personne ne puisse s’en rendre propriétaire.

@DR
Mardi 17 novembre à 5h01, un événement historique a eu lieu. Pour la première fois, un opérateur privé a emmené des astronautes en orbite extra-atmosphérique vers la Station spatiale internationale (ISS) dans le cadre d’une mission opérationnelle. Trois Américains et un Japonais, envoyés par la Nasa, ont voyagé à bord de la Capsule Dragon et de la fusée Falcon 9 opérées par SpaceX, l’une des sociétés d’Elon Musk. Un magnifique périple suivi partout dans le monde.
Ce succès n’est que l’avant-garde d’une nuée d’opérateurs privés - Blue Dragon, Rocket Lab, Airbus, Lockheed Martin, Virgin Galactic… - qui visent l’orbite terrienne, la lune, Mars, la ceinture d’astéroïdes pour y développer des activités économiques. Des ambitions qui risquent bien de faire une entaille dans le traité de l’espace de 1967. Le monde est alors en pleine guerre froide. En 1957, le lancement de Sputnik 1 faisait craindre le début de la guerre spatiale. Et en 1967, le premier alunissage (une mission russe non habitée) laisser envisager la colonisation du système solaire.
C’est pourquoi le Comité des utilisations pacifiques de l'espace extra-atmosphérique de l'ONU, créé dès 1959, décide d’encadrer la suite de l’aventure spatiale. Ainsi, le traité de l’espace voit le jour le 27 janvier 1967 et est signé par les États-Unis, l’Union soviétique et le Royaume-Uni. La France, qui possède son Centre National d’Études Spatiales (CNES) depuis 1931 le signera aussi en 1970. Ce traité prévoit que tous les États puissent accéder à l’espace sans se l’approprier.
Barack Obama change la donne
Il indique aussi qu’aucune arme ou installation militaire ne peut être déployée ou testée dans l’espace. En 1979, un nouveau traité sera créé concernant la lune et les autres corps célestes. Il indique que ceux-ci n’appartiennent à personne, s’inspirant des lois gérant les eaux extraterritoriales sur Terre. Le traité est de fait inutile puisqu’aucun des pays qui ont des programmes lunaires actifs aujourd’hui, comme les États-Unis, le Japon, la Chine ou l’Inde, ne l’ont ratifié.
De toute manière, la non-propriété de l’espace, des planètes ou des astéroïdes semblent d’ores et déjà être de l’histoire ancienne. En effet, de nombreux astres seraient riches de matières premières. Et il sera tout à fait possible d’aller les miner dans notre voisinage dans les décennies à venir. C’est pourquoi en 2015, Barack Obama a signé le Space Act.
Il indique que des "citoyens américains peuvent entreprendre l'exploration et l'exploitation commerciales des ressources spatiales", même si cela ne leur en donne pas la propriété. Seule limite, il est interdit d’exploiter des ressources vivantes si celles-ci venaient à être découvertes. Quant à Donald Trump, il a ordonné la création en 2019 d’une Space Force visant à assurer la défense des États-Unis dans l’espace.
Ludovic Dupin @LudovicDupin