Publié le 05 septembre 2020
ÉCONOMIE
[À l’origine] Avec son commissariat au Plan, Emmanuel Macron ressuscite un artisan de la modernisation
Le Président de la République a nommé François Bayrou à la tête du Haut-Commissariat au Plan. Cette institution, créée en 1946 à la sortie de la seconde guerre mondiale par le général de Gaulle, est à l'origine de la modernisation de la France et du développement de fleurons industriels. Si aujourd'hui, avec la mondialisation et le libéralisme, le contexte est bien différent, Emmanuel Macron tente de renouer avec l'esprit du Plan et son objectif de penser la France à long terme.

@Staff/AFP
C’était en 1946. Au sortir de la Seconde guerre mondiale, l’économie française est au plus mal. Le Commissariat général du Plan de modernisation et d’équipement (CGP), porté par le général de Gaulle, dont il donne la direction à Jean Monnet, futur père de l’Union européenne, doit remplir quatre missions : "accroître la production et les échanges avec le monde", "porter le rendement du travail au niveau de celui des pays où il est le plus élevé", "assurer le plein-emploi de la main-d’œuvre" et "élever le niveau de vie de la population". Les objectifs sont ambitieux et les réponses apportées le sont tout autant.
Alors que le pays concentre ses efforts sur la relance du charbon, de l’électricité, du ciment, du machinisme agricole, du transport ou encore de l’acier, les plans successifs développent des fleurons industriels comme EDF ou Air France, sur lesquels l’État à une main mise. Période des Trente Glorieuses, la France vit de grandes heures et les innovations industrielles fleurissent.
Renouer avec l'esprit du plan
Dans les années 80, avec le libéralisme et la mondialisation, l’efficacité des plans s’essouffle jusqu’à ce que le plan en lui-même soit supprimé en 2005. "Cela a été remis en cause précisément à partir de 1993, quand Édouard Balladur était Premier ministre, car on entrait dans une situation où le libéralisme imposait d'avoir des politiques économiques et industrielles à plus court terme", souligne auprès du Parisien Luc Rouban, chercheur au Cevipof et directeur de recherches au CNRS.
Si aujourd’hui, dans un contexte où l’État n’a plus la même emprise sur l’économie qu’au sortir de la Seconde mondiale, il semble impossible pour Emmanuel Macron de rejouer la partition du Général De Gaulle, le chef de l’État semble vouloir renouer avec l’esprit du plan. Son Premier ministre, Jean Castex, a ainsi déclaré : "On m’a présenté comme gaulliste social, je pense qu’il faut rééclairer l’action publique d’une vision de long terme". Le plan de relance de 100 milliards d’euros que vient de dévoiler le gouvernement semble s’inscrire dans cette tendance.
Mais en choisissant François Bayrou à la tête du Haut-Commissariat au Plan et à la prospective, Emmanuel Macron pourrait, dès sa renaissance, affaiblir cette institution. Le président du Modem est en effet mis en examen dans l’affaire des assistants du parti centriste, il avait d’ailleurs, pour cette raison, démissionné de son poste de Ministre de la Justice en 2017.
Marina Fabre, @fabre_marina